La régulation émotionnelle est un processus par lequel les personnes influencent les émotions qu’elles ressentent. On peut le comparer à une boucle de rétroaction, c’est-à-dire un phénomène d'influence mutuelle et auto-entretenu entre deux ou plusieurs variables. Selon les neurosciences, la régulation émotionnelle implique une interaction complexe entre diverses régions du cerveau qui gèrent la perception des émotions et leur expression. Les principales structures cérébrales impliquées sont :
L'amygdale : elle joue un rôle clé dans la détection et la réponse aux stimuli émotionnels, en particulier les menaces ou les émotions telles que la peur. C’est une composante essentiel du cerveau reptilien, le plus ancien, responsable d’une grande part de nos décisions.
Le cortex préfrontal : cette région est essentielle pour la gestion consciente des émotions. Elle permet d'inhiber ou de moduler les réponses émotionnelles, en particulier celles générées par l'amygdale. Il facilite également la planification des réactions adaptées. C’est une partie typiquement humaine du cerveau, responsable des opérations les plus complexes, comme le langage.
L'hippocampe : associé à la mémoire et à l'apprentissage, il intervient dans le contexte émotionnel et permet de moduler les réactions en fonction des expériences passées.
La régulation émotionnelle peut être consciente ou inconsciente, et les stratégies utilisées varient selon les circonstances. Parmi les stratégies conscientes, on trouve la réévaluation cognitive, qui consiste à modifier la façon dont une situation est perçue pour en diminuer l'impact émotionnel. D'autres stratégies incluent l'évitement, la suppression ou l'expression directe des émotions.
Les neurosciences montrent que la régulation émotionnelle est un processus dynamique qui implique l'équilibre entre les réponses automatiques générées par les centres émotionnels du cerveau (comme l'amygdale) et les mécanismes de contrôle volontaires du cortex préfrontal. Un dysfonctionnement dans ce système peut être à l'origine de troubles émotionnels comme l'anxiété, la dépression, ou encore des comportements impulsifs. La compréhension de ces mécanismes ouvre des voies pour moduler les émotions.
rEGULATION EMOTIONNELLE ET ARTS
Le lien entre la régulation émotionnelle et l'art-thérapie est profond, car l'art-thérapie offre un espace sûr et créatif pour explorer, exprimer et transformer les émotions. Elle fournit des moyens concrets pour améliorer la capacité à gérer les émotions, en s'appuyant sur des techniques artistiques qui mobilisent à la fois les processus cognitifs et émotionnels.
L'art-thérapie permet aux individus d'exprimer des émotions souvent difficiles à verbaliser. En produisant une œuvre artistique – que ce soit à travers la peinture, le théâtre, la danse ou d'autres formes créatives – les personnes peuvent extérioriser des émotions complexes ou refoulées et ensuite les reconnaître du fait même qu’elles deviennent extérieures et donc observables.
Les neurosciences montrent que l'expression artistique engage les mêmes régions du cerveau que celles associées à la régulation des émotions, comme le cortex préfrontal et l'amygdale. Un duo de chercheurs, Kelly Sarah Barnett et Fabian Vasiu*, ont récemment compilé différentes études scientifiques sur l’utilisation des arts dans un but thérapeutique. Leurs résultats soutiennent l'hypothèse selon laquelle les arts créatifs peuvent mobiliser des réseaux neuronaux similaires à ceux utilisés dans la régulation émotionnelle, offrant une base neuroscientifique pour décrire les avantages observés des thérapies créatives dans l'amélioration de l'intelligence émotionnelle et la facilitation du traitement émotionnel.
En transformant une émotion en création, le processus artistique permet de diminuer l'activation émotionnelle intense (par exemple, l'anxiété ou la colère) en la rendant plus tangible et plus gérable.
Activation des émotions et intégration cognitive
L'art-thérapie stimule également le processus de réévaluation cognitive, une stratégie de régulation émotionnelle importante. Lorsque les personnes participent à une activité artistique, elles revisitent et interprètent leur expérience émotionnelle, souvent de manière symbolique ou métaphorique. Cela leur permet de modifier la manière dont elles perçoivent une situation difficile ou douloureuse, facilitant ainsi une meilleure régulation.
Le fait de créer, en engageant la pensée symbolique, permet aussi de travailler sur l'intégration entre l'esprit rationnel et l'émotionnel. Les neurones miroirs, activés dans les processus de création artistique ou d'observation d'art, facilitent la connexion entre les émotions vécues et les réponses comportementales adaptées, renforçant ainsi la gestion émotionnelle.
Bénéfices thérapeutiques
L'art-thérapie contribue à renforcer la résilience émotionnelle, c'est-à-dire la capacité à récupérer après des événements émotionnels difficiles. Les praticiens de l'art-thérapie aident les individus à explorer des sentiments de manière non menaçante, ce qui favorise la régulation des émotions à long terme.
En somme, l'art-thérapie représente un outil puissant pour soutenir la régulation émotionnelle. Elle permet aux individus de mieux comprendre, exprimer et transformer leurs émotions, tout en engageant les processus cérébraux qui facilitent l'équilibre entre le contrôle émotionnel et l'expression créative.
*Kelly Sarah Barnett and Fabian Vasiu, How the arts heal : a review of the neural mechanisms behind the therapeutic effects of creative arts on mental and physical health, Balance Medical Center, Vancouver, BC, Canada, 2024
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